Une belle affaire immobilière : roots and moods
L’article du Canard Enchaîné appelle à une lecture attentive.
En effet, conformément à la nécessaire prudence, il n’énonce aucune culpabilité de Sarkozy, se contentant de présenter les modalités d’acquisition du bien immobilier en 1997, à un prix inférieur à celui du marché constaté par leurs journalistes, et avec des interventions sur l’appartement en partie à la charge du promoteur, pour au total une ristourne évaluée par le Canard à 300000 euros.
Plusieurs questions se posent :
1) Pourquoi cela éclate-t-il à présent ?
Comme le souligne Sarkozy lui-même, n’est-ce pas une volonté de le salir à l’approche de la présidentielle ? Je crois que ce serait trop simple. A mon avis l’origine de cette enquête du Canard réside dans les rumeurs véhiculées par l’UMP de fraude à l’ISF par le couple Hollande-Royal. En effet, pour couper court aux rumeurs le couple socialiste a présenté sa déclaration d’ISF, ce qui était peut-être le but recherché par l’UMP, pour destabiliser Royal car “comment peut-on prétendre défendre les pauvres lorsque l’on est soi-même riche ?” (position qui interdit dès lors toute action politique si on est pas à la fois médecin, écolier, lycéen, infirmier, riche et pauvre, aveugle et voyant, mort et vivant, etc).
A la suite de cela Sarkozy avait joué la transparence, promettant de montrer sa déclaration fiscale. ll ne l’a pas fait, alimentant le soupçon. Il indiquait avoir payé l’ISF seulement en 2006 suite à la revente de son appartement. Or un bien immobilier est intégré normalement à la déclaration de patrimoine, cette hausse soudaine de son patrimoine déclaré prêtait à confusion. Il y avait donc un certain flou qui peut justifier de la part de journalistes curieux et consciencieux une enquête. D’ailleurs le Canard promet une enquête sur Le Pen, Bayrou et Royal les prochaines semaines, qui devrait suffire balayer l’accusation d’anti-sarkozisme primaire. Simplement cela diffère de la position courbette des principaux journaux (il n’est pas rare d’entendre des journalistes étrangers relever que le Canard faut à lui tout seule le travail d’investigation de toute la presse politique, et s’étonner du peu de réactions des autres médias face aux éléments relevés hebdomadairement par le Canard, dans la tradition saint-sominienne du journalisme de cour, à l’affût de la petite phrase).
Alliot-Marie s’insurge : pour elle il s’agit du degré zéro de la politique. Je passe le fait que tout cela éclate à mon avis en raison des rumeurs diffusées par l’UMP : elle n’était sans doute pas au courant. Mais si il y a un soupçon aussi infime soit-il n’est-il pas du devoir de tout journaliste de le lever ? Aujourd’hui le sentiment de méfiance vis-à-vis de la politique n’est-il pas basé sur les soupçons récurrents d’enrichissement personnel ? Ne faut-il pas élire quelqu’un en qui l’on a entièrement confiance ?
Pour le moment il faut donner crédit à Sarkozy, mais continuez à pousser cet éclaircissement, il en va de la confiance en la Républqiue et ceux qui la servent. Si il y a un doute sur Royal, il faut pareillement faire la lumière et que les journalistes d’investigation s’y attelent.
Je suis d’accord avec cette citation de Mam :
«Je suis extrêmement inquiète de voir que des journaux essaient de trouver des sujets de bas étage plutôt que de parler du fond de la campagne».
Outre le fait que l’appartement concerné est effectivement au rez-de-chaussée, ce qui rend cocasse cette citation, dans une maison les bas-étages sont ceux qui portent les sommets. De la même façon la condition du débat politique est la probité publique de ceux qui le portent. Le journalisme de bas-étage est nécessaire au journalisme qui cotoie les sommets du débats d’idées.
2) Et alors ?
Au final qu’est-il reproché à Sarkozy dans l’article du canard ?
Il ya deux éléments présents dans cet article :
Enfin, cela apparaît dans Libération d’aujourd’hui, se repose la question de sa déclaration de revenu et du paiement de l’ISF.
Même si je suis opposé à Sarkozy, il semblait incarner une nouvelle éthique concernant le partage entre vie privée et vie publique. J’espere donc que ces problèmes trouveront une issue raisonnable, pour ne pas ajouter encore de la méfiance envers la politique. Toutefois la confiance passe par l’absence de doute, et donc le journalisme d’investigation, qui prend ses responsabilités et qui comme le canard ne publie des éléments que lorsqu’il y a doute. Souhaitons donc que NS puisse faire toute la lumière et dissiper le malentendu, pour que des rez de chaussée s’élèvent les débats d’idées et la France.