les statistiques de la délinquance
La police a été encouragée par le ministre de l’intérieur à produire des résultats. Ces résultats doivent se traduire par un taux d’élucidation des affaires en progression, et une chute de la délinquance.
Ensuite ces différents éléments sont mesurés et alimentent les “statistiques de la délinquance”.
Deux chercheurs en sciences politiques et sociologie ont examiné les tableaux de résultat et produit une étude en accès libre.
Ils mettent en évidence certaines bizarreries : ainsi pour certains types de délinquance le taux d’élucidation est supérieur à 100%. Par exemple lorsqu’un jeune est arrêté en possession d’un joint, il n’y a pas de plainte mais élucidation automatique. De même pour un recel l’élucidation dans certaines statistiques est portée non pas sur le recel en soi mais sur chaque marchandise recelée, même lorsqu’elle relève des mêmes receleurs. Parallèlement cette enquête montre que ces surévaluations se font plus fortes depuis 2003.
Les auteurs gardent une louable prudence dans leur interprétation des chiffres : en tous cas cette étude soulève le problème de l’autoévaluation dans un contexte d’incitations ministérielles fortes à produire des “résultats”, avec toute cette ambiguïté sur des résultats qui dépendent très fortement de la mesure.
Je crois avoir déjà rappelé plusieurs fois cette règle simple : pour faire baisser le nombre de plaintes, et donc in fine les chiffres de la délinquance, il suffit de fermer les bureaux d’enregistrement de ces plaintes, par exemple les commissariats déployés dans le cadre de la police de proximité (rappelez vous ce fameux discours de Sarkozy en 2002 à Toulouse sur les missions de la police, et l’humiliation publique devant caméras d’un fonctionnaire de police qui avait mis en oeuvre une police de proximité citée en exemple et qui s’attendait à une réunion de routine). Les incivilité et faits sur biens diminuent mécaniquement. Le problème aujourd’hui est que les chiffres de la déliquance sont devenus un enjeu de la campagne électorale et l’argument principal de la crédibilité d’un des candidats majeurs à la présidentielle, depuis 5 ans. Et que ces chiffres sont victimes de toutes les manipulations et mises en avant spectaculaires, loin d’un consensus sur un bilan, ce qui est pourtant le seul intérêt de la publication de ces résultats.
Remarque supplémentaire = démonstration du caractère tortueux des chiffres de la délinquance : l’émission Ripostes du 10 décembre 2006, spéciale Nicolas Sarkozy, débat entre Sarkozy et Portelli, à partir de 1H12 mn d’émission, sur les chiffres de la récidive.
Résumé : Sarkozy énonce que 50% des crimes et délits sont commis par 5% des délinquants. Ce à quoi Portelli répond fort à propos que le taux de récidive est de 34%, ce qui ne permet pas de donner de façon certaine le pourcentage de récidive, tout au plus peut-on raisonner par extrapolation.