l’abbé Pierre
L’abbé Pierre fait et fera l’unanimité désormais. Mais il n’y a pas unanimité sur ce qu’il réclame, un véritable droit au logement pour tous, il y a unanimité affective.
Je ne vais pas ajouter mon éloge aux milliers qui vont déferler. Pour moi l’abbé Pierre a d’abord eu les traits de Wilson, film passé en cours de religion dans les années 90, et puis très vite il est devenu vieillard. Les images ont réduit au rang de symbole une vie de 60 ans d’engagement.
Loin des images emblématiques, des quelques mots clefs qui résonnent dans le coeur de tous, sans parfois atteindre la raison et leur traduction en actions politiques, je rappelle juste quelques lignes qui sembleront totalement décalées avec les hommages à venir, tant elles sembleront prosaïques.
“Je veux marquer l’importance de l’article 55 de loi de Solidarité et renouvellement urbain (SRU) qui instaure un objectif de mixité sociale en imposant aux communes de plus de 3 500 habitants de construire 20 % de logements HLM. Or on me rapporte que des amendements visent à limiter, voire diminuer les obligations incombant aux élus. Ce n’est pas acceptable.” (janvier 2006, au moment de son audition à l’Assemblée nationale)
Cette citation est importante : au moment où le consensus sur l’abbé Pierre va encore grandir, il ne faut pas oublier les mille lois et pratiques quotidiennes qui mettent en action ses utopies (car on en est à ce stade là en France pour le logement), et maintenir une vigileance sur l’existant, pour au moins éviter que le futur de ce point de vue ne devienne pire. Son engagement était certes porté par des valeurs, avec lesquelles il est facile d’être d’accord, mais il se traduisait par des appels incessants aux français et aux dirigeants politiques, pour la mise en oeuvre de ces valeurs, dans la charité mais aussi dans des actions politiques. Que celles-ci ne faiblissent pas.
Tous les ans la fondation de l’abbé Pierre publie une enquête sur le mal-logement. Cela va continuer. Ces enquêtes n’ont pas souvent été prises comme aiguillon de la politique nationale du logement. Avec la mort de son héros éponyme cela sera plus dur encore.
Pour illustration de mes propos un dialogue qui illustre le peu de cas fait par certains députés français des actions concrètes menées par la fondation de l’abbé Pierre. Je ne cherche pas à relancer une polémique vieille d’un an, mais juste à ne pas me reposer sur les images d’Epinal d’un jeune abbé devenu vieillard appelant sans relâche à la solidarité. Sa figure a été consensuelle mais son engagement pas suivi aussi facilement.
Sa vie éternelle est la présence de ses principes dans nos actions.